Guerres, archaïsmes des
structures sociétales, industrialisation sauvage et
désordonnée, démographie galopante, désintégration des liens
sociaux sont les effets les plus destructeurs sur des
millions d’enfants qui semblent ne voir le jour que pour
sombrer aussitôt dans la nuit.
Pour un enfant sur dix environ la rue est devenue son foyer.
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120
millions d'enfants dans la rue
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120 millions
c’est le chiffre estimé aujourd’hui par des
études conjointes du BIT (Bureau
international du Travail) et l’UNICEF du
nombre d’enfants qui vivent dans la rue, la
moitié de ces enfants vit dans le continent
sud-américain et 30 millions en Asie.
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Qui
sont les enfants des rues
?
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Les
enfants des rues ont entre 5 et 16 ans, mais
il est courant d’en rencontrer qui ont à
peine 3 ou 4 ans aux côtés de frères plus
âgés qui assurent leur protection. La
majorité des enfants des rues sont des
garçons. Les filles ont en effet moins
visibles dans la rue pour deux raisons:
La première est qu’elles sont moins
aventureuses et hésitent plus à quitter leur
milieu familial même lorsque les conditions
de vie sont exécrables.
La seconde raison est qu’elles travaillent
de façon moins visible comme domestiques,
ouvrières dans des ateliers clandestins ou
comme prostituées dans les établissements
spécialisés.
Elles
concernent 10% des enfants des rues, sauf à
Bangkok où elles sont 70% en raison de la
prostitution. Dans beaucoup de pays, leur
nombre tend à augmenter. Souvent avant
d'être pubères, elles s'habillent en garçon
pour ne pas être embêtées. Même très
petites, elles sont pratiquement toujours
victimes de la prostitution.
Dans la majorité des cas, les enfants des
rues sont issus de familles nombreuses
rurales que le mirage des villes a poussé à
migrer. Actuellement près de la moitié de
tous les enfants des pays en voie de
développement vit dans des agglomérations
urbaines, c’est à dire pour la plupart dans
des bidonvilles.
Les enfants des rues ne rentrent pas tous
dans la même typologie. Bien que la
situation de chacun de ces enfants soit
tragique les organismes spécialisés les
classent en 3 groupes :
Les enfants qui ont conservé une relation
constante avec leur famille c’est à dire
qu’ils vivent avec leur famille dans la rue.
Les enfants qui travaillent dans la rue, y
passent leurs journées et une partie de la
nuit, mais qui gardent un contact permanent
avec leur famille qui possède un domicile,
même précaire. L’action de ces enfants dans
la rue est souvent un apport économique non
négligeable à la famille. Leur présence dans
la rue est également liée à de graves
problèmes familiaux.
Les enfants démunis, qui n’ont plus aucun
contact avec leur famille ce qui constitue
les situations les plus critiques. Leurs
origines sont diverses. Ils peuvent être
orphelins, enfants réfugiés ou déplacés,
avoir été chassés de la maison pour réduire
le nombre de bouches à nourrir, avoir été
abandonnés par des parents qui n’arrivent
pas à survivre ou encore fugueurs comme
c’est le cas dans de nombreux pays
occidentaux.
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Une
vie terrifiante
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Une
fois à la rue et livrés à eux-mêmes, les
enfants, le corps rongé par la crasse et la
vermine dorment sur des bancs ou à même le
trottoir. Les plus débrouillards se
construisent des abris en carton. D’autres,
comme en Russie vivent dans les égouts.
Pourchassés par la police, livrés à
l’indifférence générale ces enfants ont très
peu de chances de trouver assistance. Seules
les ONG (Organisations Non
Gouvernementales), lorsqu’elles existent,
tentent d’apporter un réconfort. Ici où là
des initiatives individuelles voient
également le jour. Beaucoup d’enfants vivent
en bandes, se livrent à la délinquance et
survivent grâce à la rapine et la mendicité.
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Les
métiers de la rue
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Beaucoup des enfants des rues exercent une
activité laborieuse. Les petits métiers
pratiqués sont les mêmes sur tous les
continents. Il s’agit en fait d’une
incessante quête quotidienne pour trouver de
quoi subsister non seulement pour eux-mêmes
mais aussi, le cas échéant, pour leur
famille. Deux situations sont à considérer :
Le travail organisé par la famille c’est à
dire que l’enfant est le vecteur économique
de celle-ci à qui il reverse la recette de
son activité qui est généralement issue de
la vente.
L’enfant abandonné qui crée son propre
emploi pour survivre. Il est porteur devant
un supermarché, livreur, gardien ou laveur
de voitures, cireur de chaussures, vendeur
de différents produits, nettoyeur de tombes
comme au Pérou, tireur de pousse-pousse ou
pousseur de chariots-taxi comme aux
Philippines….
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Les
dangers de la rue
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Les enfants
des rues rencontrent des dangers et des
dérives qui leurs sont souvent fatals.
Ils sont meurtris par les intempéries, les
privations, le dénuement, les maladies, les
accidents et l’indifférence. A cela
s’ajoutent la précarité, la violence, les
sévices sexuels, la loi du plus fort qui les
exposent aux rencontres et influences les
plus nuisibles.
Les petites filles sont sollicitées
sexuellement dès leur plus jeune âge et
finissent par se prostituer. D’ailleurs,
dans la plupart des pays, la prostitution
des filles et des garçons se banalise et
constitue une source de revenus pour les
enfants.
Enfin la plupart des enfants des rues
connaissent la drogue, même les plus petits.
En fonction du pays ils consomment la coca,
la marijuana, les déchets de cocaïne (bazoca),
le cacao sabanico dont les pépins sont
hallucinogènes ou encore des mélanges tel
que le pipo en Colombie (mélange de lait,
d’alcool local et d’essence).
Mais la vraie drogue des pauvres la plus
répandue est la colle de cordonnier. On la
verse dans un sac en plastique avant de la
respirer. Il arrive également que faute de
colle, les enfants débouchent les réservoirs
d’essence des voitures pour en inhaler les
vapeurs. Dans les pays industrialisés ce
sont le crack et l’extasie qui font le plus
de ravages.
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Les
enfants et les gangs
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Une
des caractéristiques des enfants des rues
est leur rassemblement en bandes ou en gangs
qui comptent en général entre 10 et 20
membres mais qui peuvent atteindre 50 ou 100
enfants. Dans certains pays ces bandes
deviennent de véritables fléaux. Libérés de
toutes contraintes sociales, rejetant les
lois et les institutions, elles ont leur
langage, leur code, leur territoire, leur
organisation et vivent principalement de
vols, de cambriolages et d’agressions. Mais
le risque le plus grand pour ces enfants est
de se faire enrôler dans un véritable gang
criminel qui va les utiliser pour le trafic
de drogue, la mendicité, le vol, les
agressions armées et quantités d’autres
activités illégales.
Quelques exemples :
En Europe de l’Est, l’utilisation des
enfants des rues est devenue un phénomène
très préoccupant depuis l’éclatement de
l’empire soviétique. Les délinquants louent
les services des enfants pour écouler des
marchandises volées, vendre de la drogue et
des armes. Entre 1990 et 1995 le nombre de
délinquants âgés de 12 à 15 ans a augmenté
de 55% en Russie (source : Office central
des statistiques). De jeunes adolescents
russes jouent un rôle actif, moyennant
finances, dans les nouvelles formes de
criminalité telles que le racket ou les
enlèvements d’enfants. Les autorités russes
prévoient que l’embrigadement des enfants et
jeunes adolescents dans le milieu du crime
organisé et de la mafia va augmenter de
manière considérable dans les prochaines
années. Ils seraient près d'1 million dans
la rue aujourd'hui (chiffre 2005 - source :
Procureur Général de Russie)
En Italie, la Camora napolitaine, la
Ndrangheta calabraise et la Mafia sicilienne
se servent de milliers d’enfants pour
assumer un très grand nombre de tâches,
telles la surveillance, l’acheminement de
message, la levée des impôts de protection,
la vente de cigarettes et même pour
accomplir des crimes. En Sicile on appelle
ces enfants tueurs les « Baby Killer ».
Aux États Unis, les armes à feu sont la
première cause de mortalité chez les enfants
et les adolescents masculins. Toutes les
deux heures un enfant est tué par balle !
Pas étonnant dans un pays qui compte 200
millions d’armes en circulation et qui
relève 25 000 homicides (meurtres) par an.
Un sénateur américain, qui se bat contre la
prolifération des armes, relevait récemment
que son pays compte 31 fois plus de vendeurs
d’armes que de restaurants Mac Donalds ! Il
ne faut donc pas être surpris de constater
que des gosses de 10 ou 11 ans, appartenant
à des gangs de rue soient armés jusqu’aux
dents. En 1996, plus de 6000 élèves ont été
expulsés de leur établissement scolaire pour
avoir tenté d’y introduire une arme à feu.
Certaines écoles ont même installé des
détecteurs de métaux à l’entrée de leur
établissement. De récentes affaires ont
défrayé la chronique où des adolescents
avaient ouvert le feu sur leur camarades. En
1999 on a dénombré 68 meurtres par arme à
feu dans les écoles américaines.
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Les
enfants des rues pourchassés ou tués
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Certains pays ont organisé des réactions
violentes pour faire face à la prolifération
du nombre d’enfants des rues. C’est la cas
notamment du Guatemala, de la Colombie, du
Pérou et du Brésil. Je citerai par exemple
les trop célèbres « escadrons de la mort »
au Brésil qui sont financés par des hommes
d’affaires locaux qui souhaitent « nettoyer
» leurs quartiers des enfants des rues. Ces
escadrons de la mort, composés de policiers
subalternes et d’officiers de la police
militaire, veulent se substituer aux lois
estimées trop lentes et inefficaces. Depuis
une quinzaine d’années, tous les jours, des
enfants, souvent très jeunes, meurent
assassinés. A l’instar des escadrons de la
mort des milices privées se sont créées dans
les pays précédemment cités. La présence
importante d’enfants dans la rue assure à
ces milices une certaine approbation de la
population nantie et donc leur quasi
impunité.
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Les
enfants des rues en chiffres
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Selon
l'ONU, 120 millions d'enfants vivent dans la
rue, soit un enfant sur cinq.
Bangladesh :
plus de 3 millions d’enfants âgés de 5 à 15
ans constituent 72 % des miséreux en zone
urbaine.
Cambodge :
dans les grandes villes 30 % des sans
domiciles sont des enfants. Ce taux ne cesse
de croître à Phnom Penh
Inde :
plus de 150 000 enfants sont dans la rue à
Delhi et plusieurs millions dans le pays
Indonésie
:
on estime à plus de 7 500 enfants réfugiés
dans le métro de Djakarta
Mongolie :
près de 43 000 enfants occupent les villes
de leur pays
Birmanie
(Myanmar) :
plus de 7 000 enfants sont dans la rue dans
la capitale Rangoon
Népal :
plus
de 9 000 enfants sont dans les rues de la
capitale Katmandou
Pakistan :
entre 20 et 45 000 enfants sont dans les
rues de karachi
Philippines :
550 000 enfants vivent dans les rues de
Manille, dont 50 000 à 80 000 dans le métro
de la capitale. Plusieurs milliers d’autres
sont recensés dans les principales villes du
pays.
Thaïlande
:
plus de 180 000 enfants vivent dans les
principales villes du pays.

Viêt-Nam :
65 000 enfants vivent dans les principales
villes du pays dont 7 600 à Hanoi et 18 800
à Hô Chi Minh-Ville. La moitié de ces
enfants se prostitue.
Turquie
:
plus de 17 000 enfants de 7 à 15 ans
subsistent dans les rues d’Ankara en faisant
des petits métiers. Ils sont autant à
Istanbul. Ces chiffres sont en augmentation
après le tremblement de terre de 1999 qui à
laissé des familles entières sans ressources
ni domicile.
Chine :
10 millions d’enfants clandestins naissent
chaque année en milieu rural et cela en
marge du planning officiel des naissances
qui n’autorise qu’un seul enfant par couple.
N’étant pas déclarés, ils n’ont aucune
existence légale et sont destinés à rester
des marginaux toute leur vie. Ce sont eux
qui viennent grossir les rangs des enfants
des rues lors des flux migratoires. On
compte 300 000 enfants dans les rues de
Shanghai et de Guangdong. Dans l’ensemble du
pays ils seraient plusieurs millions.
Nicaragua
:
16 000 enfants sont livrés à eux-mêmes dans
les rues de la capitale Managua.
Colombie :
beaucoup de parents abandonnent leurs
enfants pour des nécessités économiques.
Depuis le début des années 90 on compte plus
de 50 000 abandons par an. Ces enfants
viennent grossir le nombre d’enfants dans
les rues de ce pays.
Guatemala
:
plusieurs dizaines de milliers d’enfants
sont orphelins dans ce pays. On estime à
5 000 le nombre d’enfants dans les rues de
Guatemala City.
Russie :
chaque année 60 000 enfants fuguent pour
fuir les coups, les traitements cruels et
les comportements immoraux de leurs parents.
Tous vont vers les grandes villes et on
estime à 800 000 enfants dans la rue dans
toute la Fédération de Russie.
Zaïre :
au moins 35 000 enfants sont dans les rues
des principales villes du pays. Dans la
capitale Kinshasa, ils sont plus de 7 000
totalement abandonnés. Réputés porter
malheur, ils sont appelés « enfants sorciers
» par la population qui les fuit et les
persécute.
France :
on estime aujourd’hui à 40 000 le nombre
d’enfants livrés à eux-mêmes. Chiffre en
nette augmentation provoqué par les flux
migratoires venant des pays de l’est et
notamment des minorités Tziganes Roumaines.
Il n’est plus rare aujourd’hui (bien que
cela soit interdit par la législation
française) de voir de très jeunes
enfants proposer leurs services à certains
carrefours de nos grandes villes : pour le
nettoyage des pares brises des voitures ou
bien encore mendier dans les rues ou le
métro.
États
Unis :
1 850 000 enfants sont portés disparus
chaque année. La majorité d’entre sont des
fugueurs. 10 à 20 000 de ces enfants ne sont
jamais retrouvés et deviennent, pour la
plupart, des enfants des rues. A Chicago par
exemple ils sont 4 à 5 000 sans abri.
Roumanie :
à Bucarest ils seraient entre 3 et 5 000 à
errer dans les rues, se terrant la nuit
comme des taupes, dans tous les recoins
possibles.
(Source : UNICEF -
2017)
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