Engagements de Paris
en vue de protéger les enfants
contre une utilisation ou un recrutement illégaux
par des groupes ou des forces armées.
Paris- Février 2007
(Version consolidée)

Nous,
Ministres et représentants des Etats
réunis à Paris les 5 et 6 février 2007 afin de réaffirmer
avec force notre préoccupation commune face à la situation
critique des enfants touchés par des conflits armés, notre
conscience des préjudices physiques, affectifs, moraux,
sociaux, psychologiques et en termes de développement causés
aux enfants par ces violations de leurs droits durant les
conflits armés ainsi que notre engagement à identifier et
mettre en oeuvre des solutions durables au problème de
l’utilisation et du recrutement illégaux d’enfants dans les
conflits armés,
Rappelant
l’ensemble des instruments
internationaux relatifs à la prévention du recrutement ou de
l’utilisation d’enfants dans les conflits armés, à leur
protection et leur réinsertion, et à la lutte contre
l’impunité pour les auteurs de violations des droits des
enfants, ainsi que les instruments régionaux pertinents,
énumérés dans l’annexe au présent document, et appelant
notamment tous les Etats qui ne l’ont pas déjà fait à
envisager de ratifier prioritairement la Convention relative
aux droits de l’enfant et ses protocoles facultatifs,
Rappelant
les résolutions 1261 (1999), 1314
(2000), 1379 (2001), 1460 (2003), 1539 (2004) et 1612 (2005)
du Conseil de Sécurité, qui ont condamné de manière réitérée
l’utilisation et le recrutement illégaux d’enfants par des
parties à des conflits armés, en violation du droit
international et ont appelé à y mettre un terme, aboutissant
à la mise en place d’un mécanisme de surveillance et de
communication de l’information ainsi que d’un groupe de
travail chargé de traiter des violations des droits des
enfants commises en période de conflit armé,
Rappelant
les Principes du Cap de 1997 («
Principes du Cap et meilleures pratiques concernant la
prévention du recrutement d’enfants dans les forces armées
et la démobilisation et la réinsertion sociale des enfants
soldats en Afrique »), qui ont contribué à guider les
décisions et mesures prises en vue de prévenir le
recrutement illégal d’enfants âgés de moins de 18 ans dans
des groupes ou des forces armés, de mettre fin à leur
utilisation, d’obtenir leur libération, d’assurer une
protection et un soutien à leur réinsertion ou leur
insertion dans leur famille, la collectivité et la vie
civile,
Profondément
préoccupés par le fait que les jeunes
filles demeurent largement exclues des programmes et des
initiatives diplomatiques relatifs à l’utilisation et au
recrutement illégaux d’enfants par des groupes ou des forces
armés et déterminés à inverser et redresser ce
déséquilibre,
Profondément préoccupés
par le fait que les Objectifs de
Développement du Millénaire en matière d’éducation primaire
universelle et de création d’emplois décents et productifs
pour les jeunes ne seront pas atteints tant que des enfants
continueront d’être recrutés ou utilisés illégalement dans
des conflits armés,
Reconnaissant
qu’il incombe au premier chef aux
Etats d’assurer la sécurité et la protection de tous les
enfants qui se trouvent sur leur territoire, que la
réinsertion des enfants dans la vie civile est l’objectif
ultime du processus visant à obtenir leur libération de
groupes ou de forces armés et qu’une planification en vue
d’une réinsertion devrait guider toutes les étapes du
processus et débuter le plus tôt possible ;
Nous nous engageons à :
1.
n’épargner aucun effort pour mettre un
terme à l’utilisation et au recrutement illégaux d’enfants
par des groupes ou des forces armés dans toutes les régions
du monde, notamment par la ratification et la mise en oeuvre
de tous les instruments internationaux pertinents et par le
biais de la coopération internationale ;
2.
déployer tous nos efforts afin de
faire respecter et appliquer les Principes de Paris («
Principes pour protéger les enfants contre le recrutement
illégal ou l’utilisation par des forces armées ou des
groupes armés »), à chaque fois que cela sera possible et
dans le respect de nos obligations internationales, dans nos
actions politiques, diplomatiques, humanitaires et en
matière d’assistance technique et de financement ;
Nous nous engageons en particulier
à :
3.
veiller à ce que des procédures de conscription et
d’enrôlement en vue d’un recrutement dans les forces armées
soient établies conformément au droit international
applicable, notamment au Protocole facultatif à la
Convention relative aux droits de l’enfant concernant la
participation des enfants aux conflits armés, et à mettre en
place des mécanismes visant à assurer que les conditions
d’âge soient pleinement respectées et que la responsabilité
de déterminer l’âge de la recrue incombe à la partie qui
recrute,
4.
adopter toutes les mesures
réalisables, notamment juridiques et administratives, afin
d’empêcher que des groupes armés se trouvant sur le
territoire de notre Etat respectif, et qui sont distincts de
nos forces armées, ne recrutent ou n’utilisent des enfants
âgés de moins de 18 ans dans les conflits armés ;
5.
adhérer au principe selon lequel la
libération de tous les enfants recrutés ou utilisés en
violation du droit international par des groupes ou des
forces armés doit être recherchée sans conditions à tout
moment, y compris durant des conflits armés, et que les
actions visant à assurer la libération, la protection et la
réinsertion de ces enfants ne devraient pas être
subordonnées à un accord de cessez-le-feu ou à un accord de
paix ou à tout processus de libération ou de démobilisation
pour les adultes ;
6.
lutter contre l’impunité, enquêter et poursuivre d’une
manière effective les personnes qui ont illégalement recruté
des enfants âgés de moins de 18 ans dans des groupes ou des
forces armés, ou les ont utilisés pour participer activement
à des hostilités, en gardant à l’esprit que des accords de
paix ou autres arrangements visant à mettre un terme aux
hostilités ne devraient pas comporter de dispositions en
matière d’amnistie pour les auteurs de crimes au regard du
droit international, notamment ceux commis contre des
enfants ;
7.
utiliser tous les moyens à disposition
pour soutenir les actions de surveillance et de
communication de l’information aux niveaux national,
régional et international en ce qui concerne les violations
des droits des enfants commises durant un conflit armé,
notamment dans le cadre de l’utilisation ou du recrutement
illégaux d’enfants, et en particulier appuyer le mécanisme
de surveillance et de communication de l’information créé
par les résolutions 1539 et 1612 du Conseil de Sécurité ;
8.
coopérer pleinement à la mise en oeuvre de mesures ciblées
prises par le Conseil de Sécurité à l’encontre de parties à
un conflit armé qui recrutent ou utilisent illégalement des
enfants, telle que notamment, mais sans s’y limiter,
l’interdiction de livraisons d’armes et d’équipements ou
d’assistance militaire auxdites parties ;
9.
prendre toutes les mesures
nécessaires, y compris l’élaboration de règles d’engagement,
de procédures opérationnelles types ainsi que la formation
de tous les personnels concernés en la matière, afin de
veiller à ce que des enfants recrutés ou utilisés par des
groupes ou des forces armés adverses et qui sont privés de
leur liberté soient traités conformément au droit
humanitaire international et à la législation internationale
en matière de droits de l’homme, en tenant particulièrement
compte de leur statut d’enfants ;
10.
faire en sorte que tous les enfants âgés de moins de 18 ans
qui sont détenus pour crime soient traités conformément au
droit et aux normes internationales pertinentes, notamment
les dispositions spécifiquement applicables aux enfants, et
que les enfants qui ont été illégalement recrutés ou
utilisés par des forces armées ne soient pas considérés
comme déserteurs selon le droit interne applicable ;
11.
veiller à ce que les enfants âgés de moins de 18 ans qui
sont ou ont été illégalement recrutés ou utilisés par des
groupes ou des forces armés et qui sont accusés de crimes au
regard du droit international soient considérés en premier
lieu comme des victimes de violation du droit international
et pas seulement comme des présumés coupables. Ils devraient
être traités conformément aux normes internationales de la
justice pour mineurs, par exemple dans un cadre de justice
réparatrice et de réinsertion sociale ;
12.
rechercher, conformément à la Convention relative aux droits
de l’enfant et aux autres normes internationales en matière
de justice pour mineurs, des alternatives aux poursuites
judiciaires lorsque cela est approprié et souhaitable, et
faire en sorte que, lorsque des mécanismes de vérité et de
réconciliation sont établis, la participation des enfants y
soit appuyée et encouragée, que des mesures soient prises
afin de protéger les droits des enfants tout au long du
processus et en particulier, que la participation des
enfants soit volontaire ;
13.
faire en sorte que les enfants qui sont libérés ou ont
quitté des groupes ou des forces armés ne soient pas
utilisés à des fins politiques par quelque parti que ce
soit, y compris à des fins de propagande politique ;
14.
veiller à ce que les enfants qui
franchissent les frontières internationales soient traités
conformément à la législation internationale en matière de
droits de l’homme, au droit humanitaire et au droit des
réfugiés et en particulier, à ce que les enfants qui fuient
vers un autre pays pour échapper à un recrutement illégal ou
à une utilisation par des groupes ou des forces armés
puissent effectivement exercer leur droit de demander
l’asile, à ce que les procédures d’asile prennent en compte
l’âge et le sexe et que la définition du réfugié soit
interprétée en fonction de ces derniers critères, en tenant
compte des formes particulières de persécution subies par
les filles et les garçons, notamment l’utilisation ou le
recrutement illégaux de mineurs dans un conflit armé, et à
ce qu’aucun enfant ne soit reconduit de quelque manière que
ce soit à la frontière d’un Etat où il existe un risque
réel, évalué au cas par cas, soit de torture, ou de
traitement cruel et inhabituel, ou de châtiment, soit
lorsque l’enfant est reconnu comme réfugié aux termes de la
Convention de 1951 sur les réfugiés, soit de recrutement
illégal, ou de nouveau recrutement ou d’utilisation illégaux
par des groupes ou des forces armés ;
15.
faire en sorte que les enfants qui ne se trouvent pas dans
l’État dont ils possèdent la nationalité, notamment ceux qui
sont reconnus comme réfugiés et se sont vu octroyer l’asile,
soient pleinement habilités à jouir des droits de l’homme
sur un pied d’égalité avec les autres enfants ;
16.
préconiser et rechercher l’inclusion, dans les accords de
paix et de cessez- le- feu, par des parties à un conflit
armé qui ont illégalement recruté ou utilisé des enfants, de
normes minimales concernant la cessation de tous les
recrutements, l’enregistrement, la libération et le
traitement ultérieur des enfants, notamment de dispositions
visant à répondre aux besoins spécifiques de protection et
d’assistance des filles et de leurs enfants ;
17.
veiller à ce que tous programmes ou actions menés ou
financés en vue de prévenir le recrutement illégal et de
soutenir les enfants illégalement recrutés ou utilisés par
des groupes ou des forces armés se fondent sur des principes
humanitaires, respectent les normes minimales applicables,
élaborent des systèmes d’engagement de responsabilité, y
compris l’adoption d’un code de conduite sur la protection
des enfants et sur l’exploitation et les abus sexuels,
18.
veiller à ce que les groupes ou forces armés qui ont recruté
ou utilisé illégalement des enfants ne soient pas autorisés
à tirer avantage durant des pourparlers de paix et des
réformes du secteur de la sécurité, notamment en
comptabilisant les enfants qui se trouvent dans leurs rangs
pour augmenter leur part d’effectifs dans le cadre d’un
accord de partage des pouvoirs.
19.
faire en sorte que tout financement destiné à la protection
des enfants soit mis à disposition le plus tôt possible, y
compris en l’absence d’un processus de paix officiel et
d’une programmation officielle en matière de désarmement, de
démobilisation et de réintégration (DDR), et veiller
également à ce que le financement reste à disposition
pendant la durée requise et pour des activités menées dans
des communautés au bénéfice d’un large éventail d’enfants
touchés par des conflits armés afin d’assurer une insertion
ou une réinsertion pleines et effectives dans la vie civile.
20.
Dans ce contexte, nous, Ministres et représentants des Etats
réunis à Paris les 5 et 6 février 2007, saluons
l’actualisation des Principes du Cap de 1997, qui
s’intitulent « Les Principes de Paris », et qui guideront
utilement notre action commune en vue de lutter contre la
situation critique des enfants touchés par les conflits
armés.
Annexe
Instruments internationaux
(i)
Convention de 1989 relative aux droits de l’enfant
(ii)
Protocole facultatif de 2000 à la Convention relative aux
droits de l’enfant concernant la participation des enfants
aux conflits armés
(iii)
Quatre conventions de Genève de 1949 et leurs protocoles
additionnels de 1977
(iv)
Convention de 1951 sur les réfugiés et son protocole de 1967
(v)
Convention de l’OIT de 1999 concernant l’interdiction des
pires formes de travail des enfants (182)
(vi)
Statut de Rome de la Cour pénale internationale
Instruments et initiatives régionaux
(i)
Charte africaine de 1999 des droits et du bien-être de
l’enfant et Charte arabe des droits de l’homme révisée,
interdisant l’exploitation des enfants dans les conflits
armés
(ii)
Déclaration de l’Association des Nations du Sud-Est
Asiatique (ASEAN) sur les engagements en faveur des enfants
dans le cadre de l’ASEAN 2001
(iii)
Adoption des «Orientations sur les enfants face aux conflits
armés » par l’Union européenne en 2003 et Stratégie de mise
en oeuvre des orientations adoptée en janvier 2006
(iv)
Résolution 1904 de 2002 de l’Organisation des Etats
américains.
(v)
Les Principes du Cap et meilleures pratiques concernant la
prévention du recrutement d’enfants dans les forces armées
et la démobilisation et la réinsertion sociale des enfants
soldats en Afrique adoptés en 1997.
Normes, principes et codes de
conduite concernant le personnel
Code de conduite pour le Mouvement international de la
Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et pour les ONGs lors des
opérations de secours en cas de catastrophes, 1994
Charte Humanitaire et les normes minimales pour les
interventions lors de catastrophes du Manuel Sphère
Principes directeurs inter-agences relatifs aux enfants non
accompagnés ou séparés de leur famille, CICR 2004
Exemple de code de conduite élaboré par une coalition
d’organisations : « Keeping Children Safe
: A toolkit for child protection » par la Coalition Keeping
Children Safe, 2006. Le Bulletin du Secrétaire général et le
Code de conduite.
Voir la liste des pays signataires
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