20 novembre 2021
Les droits de l'enfant 32 ans après

Adoptée par l’Assemblée
Générale des Nations Unies le 20 novembre 1989, la
Convention Internationale des Droits de l’Enfant
(CIDE) est le traité international le plus ratifié au
monde.
A l’exception notable des
Etats-Unis, tous les pays ont reconnu l’impérieux impératif d’apporter des soins et une attention
particulière aux enfants en raison de leur
vulnérabilité considérant que « l’humanité se doit de
donner à l’enfant le meilleur d’elle-même ». Nous
fêtons cette année, les 30 ans de ce traité majeur
pour les enfants et le 29ème anniversaire de la
ratification de ce texte par la France le 7 août 1990.
Les protocoles additionnels à la
Convention
En 2000, la CIDE a été renforcée par deux protocoles
facultatifs, soumis à ratification des Etats :
1) Le premier protocole porte sur la vente d’enfants,
la prostitution des enfants et la pornographie mettant
en scène des enfants (voir
ici). 2) Le deuxième protocole
concerne l’implication d’enfants dans les conflits
armés (voir
ici).
Le troisième protocole est entré en vigueur en 2014,
après avoir été adopté en 2011. Il permet aux enfants
issus de pays ayant ratifié ce protocole (ou à leurs
représentants) de déposer une plainte devant le Comité
des droits de l’enfant des Nations Unies lorsqu’ils
estiment qu’un droit garanti par la CIDE et les deux
précédents protocoles facultatifs n’est pas respecté
par leur gouvernement (voir
ici).
32
ans après, où en est-on ?
:
Santé, des progrès mais peu mieux faire
Les progrès les plus significatifs depuis 1989 ont été
réalisés dans le domaine de la santé. Pour autant, ils
restent relatifs : en 2017, 8,4 millions enfants (au
lieu de 14 millions en 1989) mouraient encore avant
leurs 15 ans. Si nombre de maladies virales comme la
rougeole, le tétanos ou bien encore la polio ont
pratiquement été éradiquées, puisque le taux de
mortalité des enfants pour ces épidémies a baissé de
presque 90 % en vingt-cinq ans, il n’en est pas de
même pour le SIDA. 2 millions d’enfants de par le
monde l’on contracté et 35 % d’entre eux en meurent
avant leurs 10 ans. Près de 90% de ces enfants vivent
en Afrique subsaharienne où les médicaments, pourtant
de plus en plus efficaces, tardent à arriver. D'autres
maladies, comme le virus Ebola, provoquent des ravages
en Afrique.
Malnutrition et accès à l’eau potable : une situation
dramatique
Le bilan, quoique meilleur qu’il y a vingt-six ans,
reste dramatique : 2.6 millions d’enfants meurent
chaque année parce qu’ils sont mal nourris. Dans les
pays en voie de développement, plus d'un milliard
d'habitants n'ont pas accès à l'eau salubre et près de
3 milliards de personnes (plus de la moitié de
l'humanité) ne sont pas équipées de systèmes
d'assainissement. Près de 2.5 millions d'enfants meurent
chaque année de maladies dues au manque d'hygiène et
douze millions d’entre eux meurent victimes de
pneumonie, de diarrhée et autres maladies évitables.
Pourtant de simples mesures d'hygiène, d’accès à l’eau
potable, aux médicaments, d’alimentation suffisante ou
d’allaitement maternel pourraient sauver de nombreuses
vies.
Les enfants au travail
150 millions d’enfants travaillent dans le monde alors
que les normes internationales l’interdisent. 70
millions dans des conditions dangereuses. Un chiffre
qui diminue, mais un enfant sur dix reste concerné. le
dernier rapport de l’OIT (Organisation Internationale du
Travail) montre que la lutte contre le travail des
enfants est en bonne voie, même si l’objectif d’en
éliminer les pires formes n'est toujours pas atteint.
Entre 2012 et 2016, le nombre d’enfants occupés
économiquement dans le monde a diminué de plus de 46
millions et leur proportion est passée de 16,7 à 13,8
%. Le nombre et la part des enfants qui travaillent de
manière illégale ont également diminué, passant de 168
à 152 millions d’enfants, soit de 10,6 % à 9,6 %. Même
chose pour ceux qui occupent un emploi « dangereux
», c’est-à-dire « particulièrement à risque pour
leur santé, leur sécurité, leur développement physique
ou moral » selon l’OIT : leur part est passée de
5,4 % en 2012 à 4,6 % en 2016, et leur nombre de 85 à
73 millions. Cette tendance à la diminution a été plus
marquée entre 2008 et 2012. Elle s’est ensuite
sensiblement ralentie, entre 2012 et 2016.
La
région d'Asie-Pacifique continue à enregistrer les
plus grands nombre d'enfants (presque 78 millions ou
9,3% de toute la population d'enfants), mais l'Afrique
sub-saharienne continue à être la région avec la plus
forte incidence de travail des enfants (59 millions,
plus de 21%).
Il y a 13 millions (8,8%)
d'enfants astreints au travail des enfants en Amérique
latine et les Caraïbes, tandis qu'ils sont 9,2
millions (8,4%) dans la région du Moyen-Orient et
l'Afrique du Nord.
L'agriculture continue à
être de loin le secteur avec le plus grand nombre
d'enfants astreints au travail (98 millions, ou 59%),
mais le nombre d'enfants dans les services (54
millions) et l'industrie (12 millions) n'est nullement
négligeable – principalement dans l'économie
informelle.
Le travail des enfants chez les
filles a diminué de 40% depuis 2000, alors que chez
les garçons la diminution est de 25%.
Les enfants soldats
En 2016, la plupart des Etats ont signé les
textes contre l’utilisation des enfants dans les
conflits armés. Pourtant, il y aurait quelque 250 000
jeunes âgés de 6 à 18 ans mêlés à une trentaine de
conflits dans le monde. Alors que depuis 2002, selon
le Protocole facultatif à la Convention relative aux
droits de l'enfant, la participation de ces derniers
aux conflits armés est interdite, les enfants
continuent d’être utilisés dans les guerres.
Consommant moins de nourriture que les adultes,
dociles et influençables, ils sont combattants,
poseurs de mines, voire porteurs, messagers, espions,
cuisiniers, esclaves sexuels, etc. Si la majorité
d’entre eux s’enrôlent pour fuir la maltraitance ou la
pauvreté, beaucoup sont recrutés de force ou
kidnappés. Les garçons forment le gros des troupes,
mais ils ne sont pas les seules victimes. Les filles
se battent comme eux et représenteraient presque la
moitié des enfants soldats dans le monde.
Certaines s’engagent volontairement pour échapper à un
esclavage domestique ou un mariage forcé. Enfants
soldats, elles sont souvent victimes de viol, de
traite, d’exploitation et de mutilations sexuelles,
avec des risques de grossesses non désirées, des
conditions d’accouchement tragiques et une exposition
aux MST (maladies sexuellement transmissibles) dont le
Sida.
Surtout destinés aux adultes, les
programmes DDR (Désarmement, Démobilisation,
Réintégration) des Nations unies, visant à
reconstruire la paix et la stabilité, ainsi que le
développement à long terme des sociétés après les
conflits, ont tout de même permis de démobiliser plus
de 100 000 enfants dans plus de 15 pays
Les enfants face à la guerre
Les conflits armés qui ensanglantent le monde ces dernières
décennies n’ont jamais fait autant de victimes civiles
puisqu’elles représenteraient actuellement 90 % des tués. Et
parmi elles, la moitié serait des enfants. Enfants soldats
ou pas, l’impact des guerres sur les plus petits est dès
lors considérable. En une décennie, plus de deux millions
d’enfants ont été tués, au moins six millions ont été
blessés dont une grande partie souffre d’invalidité
permanente.
Les impacts psychologiques sont également
dramatiques. Les petits qui se retrouvent face à la
décomposition de leur vie sociale, au stress, à la guerre, à
la mort de leurs parents, aux viols de leurs sœurs ou de
leur mère, demeurent psychologiquement traumatisés à vie.
Pour les enfants parvenant à échapper à la guerre, leur
sort reste malgré tout peu enviable. Ils seraient quelque
vingt millions réfugiés dans les Etats voisins ou déplacés
dans leur propre pays. Pire, sur les dix dernières années,
plus d’un million sont devenus orphelins ou ont été séparés
de leur famille.
Enfin, des milliers d’enfants sont victimes des attentats
terroristes qui frappent partout dans le monde. Ils en sont
directement victimes, tués ou blessés, ou bien ils se
retrouvent orphelins ou enfin sont embrigadés pour commettre
eux-mêmes ces attentats.
L’exploitation sexuelle des enfants
Pour le bon plaisir d'adultes sans scrupules plusieurs
millions d'enfants et d'adolescents sont prostitués ou
exploités sexuellement à travers le monde. C'est avant tout
un drame de pauvres. Même si l'on rencontre sur tous les
continents des pédophiles, la très grande majorité des
enfants prostitués et exploités sexuellement se trouvent
dans les pays du tiers monde ou dans les catégories sociales
très défavorisées des pays riches. La majorité de ces jeunes
a entre 12 et 18 ans, mais certains ont à peine 8 ans et
même des bébés sont parfois impliqués. Là aussi, de réels
progrès ont été réalisés grâce notamment à un renforcement
de l’arsenal répressif, d’une réelle prise de conscience des
populations et des campagnes d’information en direction des
enfants.
Pauvreté des enfants
Là encore des progrès ont
été réalisés. Le nombre de personnes vivant sous le
seuil d’extrême pauvreté dans le monde a diminué de
1,9 à un peu moins de 1,3 milliard entre 1981 et 2008.
Dans le même temps la population mondiale s’est
accrue. Du coup, le taux d’extrême pauvreté a été
réduit de moitié : 22,4 % de la population mondiale
vit aujourd’hui avec moins de 1,90 dollar par jour (un
peu moins de 2,5 euros) contre 52,2 % au début des
années 1980.
Le ralentissement économique mondial, la flambée des
prix alimentaires ont provoqué des conséquences
dramatiques pour les populations les plus démunies.
Enfin, ces données sont parfois partielles : il manque
les données de près de 30 % des pays d’Afrique. Selon
le rapport 2015 de l’UNICEF l’estimation totale est de
76,5 millions
d’enfants pauvres dans le monde.
L’Education, un levier majeur
Entre tous, l’éducation joue un rôle crucial. Car, même au
milieu du chaos, elle peut restaurer un certain degré de
stabilité et de normalité pour les enfants. Une amélioration
sensible a été opérée depuis 20 ans et le nombre d’enfants
non scolarisés est passé de 115 millions à 93 millions.
L’écart entre le nombre de filles scolarisées et les garçons
s’est considérablement réduit. Une amélioration qu’il faut
cependant relativiser par le taux d’achèvement des études
qui reste très insuffisant. L’éducation offre une occasion
unique de transmettre aux enfants des messages de survie sur
des questions aussi vitales que la prévention du sida et la
sensibilisation aux dangers qui les menacent. L’éducation
peut aussi permettre de semer la paix et la justice partout
dans le monde.
La situation en France
La
France est un des pays au monde qui respecte le mieux
la Convention Internationale des Droits de l’Enfant
(le Canada et la Suède font figure de meilleurs «
élèves »). Il existe toutefois de graves problèmes :
la pauvreté, qui touche 3 millions d’enfants, avec ses
conséquences désastreuses sur la scolarité, l’accès à
la santé et au logement ; la discrimination qui
pénalise les jeunes des banlieues issus de
l’immigration ou d’Outre-mer ; la situation des
mineurs étrangers isolés qui sont retenus dans les
zones d’attente des aéroports ou qui errent dans les
rues et dans des camps de fortune sans bénéficier d’assistance ; le recours
excessif aux mesures répressives, par défaut de
structures alternatives à l’incarcération des mineurs
; la situation dramatique des enfants Roms et des gens
du voyage qui perdure ; la difficulté d’intégration
scolaire des élèves handicapés, le harcèlement et le
racket à l’école, le suicide des enfants et des jeunes
; la discrimination dans les cantines scolaires, les
30 000 enfants qui sont sans domicile fixe, les
dérives sectaires de certains mineurs perdus dans le «
djihad », le droit aux origines des enfants nés sous
X, les difficultés de prise en charge des enfants par
l’aide sociale à l’enfance, etc…
Voir la page consacrée à la situation des enfants en France
:
voir ici
Les droits de l'enfant, une obligation pour l'avenir de nos
sociétés
24 % des jeunes de 13 à 18 ans, à peine un sur quatre,
ont déjà entendu parler de la Convention internationale
des droits de l’enfant (CIDE). Ainsi, on parle de
moins en moins de droits de l’enfant, sauf quand
l’actualité les ramène sur le devant de la scène
(pédophilie, maltraitance…), et parfois à tort et à
travers (mariage pour tous, « Djihad »).
En permanence de nouvelles tentatives ont lieu visant
à lier droits des
enfants avec ses devoirs avec l’idée que « l’enfant
aura des droits lorsqu’il respectera ses devoirs ».
Pourtant la convention internationale des droits de
l’enfant dit exactement le contraire et a reconnu
l’enfant comme un être humain à part entière qui n’appartient à
personne que la société doit protéger.
En effet, comment un
enfant peut-il respecter une règle, une loi venant
d’un groupe, d’un Etat qui ne le respecte pas voire
qu’il le dénie totalement ou qui l’exploite
honteusement ? C’est pourquoi, en ces temps
compliqués, il est plus que jamais nécessaire de mieux
promouvoir les droits de l’enfant et la Convention
Internationale auprès des enfants eux-mêmes.
Ce
n’est pas une question mineure, car garantir à
l’enfant le droit à la santé, à un nom, à une
nationalité, à l’éducation, aux loisirs, à la culture,
passe par le fait que ces droits soient aussi accordés
à leurs parents.
On le voit bien, du sort que l’on
réserve aujourd’hui aux enfants dépend l’avenir des
sociétés et de l’humanité toute entière.
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